A la découverte de la DMZ
zone coréenne démilitarisée ou DMZ
zone coréenne démilitarisée ou DMZ

Sur la DMZ

 

Partir à la découverte de la zone coréenne démilitarisée (qui est paradoxalement la plus militarisée au monde !!!) entre la Corée du Nord et la Corée du Sud, en abrégée DMZ (한반도 비무장 지대 en coréen) est à la fois une expérience insolite et une rencontre avec l’Histoire coréenne.

Récit d’une excursion hors du commun !

Observatoire Dora
Observatoire Dora

Nous partîmes donc de Séoul vers 7h30 en minibus en direction de la Corée du Nord ! Il faut environ 3/4 heure de route pour se rendre au village de P’anmunjŏm qui est situé à l’intérieur de la zone démilitarisée, à 56 km au Nord-Ouest de Séoul (à 140 km de Pyongyang). Pour se rendre dans ce secteur à accès restreint surveillé par la police militaire, il faut passer un check point, présenter son passeport, car la zone est ultra-sensible.

C’est ici que, suite à la guerre de Corée (25 Juin 1950 – 27 Juillet 1953), fut signé l’armistice dit de P’anmunjŏm le 23 juillet 1953. Après un accord entre la Corée du Nord, la Chine et les Nations Unies, fut décidé la création d’une zone tampon (DMZ) suivant approximativement le 38e parallèle Nord, avec pour conséquence de couper la péninsule coréenne en deux.

Cette zone forme une bande de terre qui est aujourd’hui un des derniers vestiges de la guerre froide, elle sépare deux pays frères officiellement toujours en guerre. Elle est surveillée par 700 000 soldats nord-coréens et 410 000 soldats sud-coréens aidés par la 2e division d’infanterie des États-Unis (avec qui la Corée du Sud a signé un pacte de sécurité). Il s’agit d’une zone minée, car il y aurait selon les estimations de l’ONU plus d’1 million de mines. Elle est également truffée de souterrains, de batteries de canons, de kilomètres de barbelés, d’antennes et de miradors.

Imjingak
Imjingak

Nous poursuivons la visite par le bâtiment de l’Imjingak qui est situé à 7km de la Ligne de Démarcation militaire.  Ce bâtiment construit en 1972 est un point de passage incontournable pour les visiteurs étrangers et sud-coréens qui s’intéressent pour différentes raisons à la situation entre les 2 pays ;  certains sont juste curieux ou amateurs d’Histoire, d’autres ont des parents ou amis de l’autre côté du mur végétal. Le bâtiment est entouré de monuments : un parc de la réunification, un centre dédié à la Corée du Nord avec photos et documents, et inévitablement des tanks et autres engins de guerre ayant servi lors de la guerre de Corée !

Nous continuons vers le Sud de la « Zone Commune de Sécurité » (JSA) pour explorer un tunnel « d’agression » (comme l’appellent les citoyens du Sud). Entre 1974 et 1990, les militaires sud-coréens découvrirent l’existence de quatre tunnels creusés sous la frontière par les Nord-coréens. Il pourrait y avoir jusqu’à une vingtaine de tunnels selon certains experts militaires ! Celui-ci, appelé le 3e, fut découvert en 1974 par l’armée sud-coréenne à partir de renseignements fournis par un transfuge Nord-coréen. Il semble avoir été creusé par le Nord en vue d’une attaque militaire. Il est assez étrange, voire quelque peu surréaliste, d’avancer dans ce tunnel sombre et étroit (il est assez large pour permettre le passage de deux personnes). Condamné peu avant la frontière nord-coréenne, il permet tout de même aux visiteurs de se retrouver sous la DMZ !

Coréens du Sud face à la Corée du Nord
Coréens du Sud face à la Corée du Nord

Après nous passons à la découverte en surface de la DMZ… Pour se faire, on se rend à la plateforme d’observation d’Eulji. Située très près de la « Ligne de Démarcation Militaire », elle surplombe cette « ligne » et permet d’apercevoir au loin la Corée du Nord, avec des maisons, une petite ville, le drapeau nord-coréen … et quand le ciel est dégagé il est même possible de voir le mont Birobong et les montagnes du diamant de Geumgangsan. Nous sommes là entourés de touristes venus de différents pays qui regardent vers le Nord et sont pour la plupart étonnés par le spectacle qui s’offre à eux, mais les plus émouvants sont les « touristes » Coréens du Sud qui viennent observer leurs « parentés » du Nord avec nostalgie et espoir!

Nous avons devant nous cet espace qui mesure 248 km de long et environ 4 km de large, couvert d’une épaisse forêt surveillée de part et d’autre de postes militaires, de miradors… Malgré les mines, ce no man’s land où la nature a repris ses droits est devenu un sanctuaire pour la conservation de plusieurs espèces animales ! Des associations de défense des animaux voudraient que cet espace soit inscrit comme zone protégée au patrimoine mondial de l’UNESCO ! Certains voudraient aussi introduire des tigres pour sauver l’espèce de l’extinction; la zone étant clôturée et surveillée par des militaires, les tigres ne pourraient pas sortir de la zone. D’autres pensent que des tigres sont déjà présents dans la zone, ainsi que des léopards de l’Amour (comme le fleuve russe !), de nombreuses panthères des neiges et autres espèces en voie d’extinction ! Les écologistes ont identifié quelque 2 900 espèces végétales, 70 types de mammifères et 320 espèces d’oiseaux. Des oiseaux migrateurs viennent même y séjourner en hiver (des milliers de hérons, de grues blanches…).

Entre les 2 Corée une vie animale !
Entre les 2 Corée une vie animale !

Mais les mines posent problème ! Les nombreux félins sont souvent tués par les mines, ainsi que d’autres animaux présents dans la DMZ comme des lapins, des cerfs ou des sangliers. Étonnamment les accidents diminuent ces dernières années, les spécialistes de la faune pensent que les animaux sont conscients des zones de danger, et qu’ils ont établi leurs propres zones de vie !

Joint Security Area
Joint Security Area

Si la faune et la flore ont repris leur droit, la circulation des humains dans la zone est extrêmement restreinte et rare. Plusieurs s’y étant aventurés y ont trouvé la mort. Le seul point officiel de passage existant est la « Joint Security Area » (JSA), placé sous contrôle de l’ONU. C’est à cet endroit précis que ce sont rencontrés le président sud-coréen Moon Jae-in et le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un en avril et mai 2018 et qu’ils ont publié une déclaration commune dans laquelle ils s’engageaient à améliorer leurs relations…

Gare de Dorasan
Gare de Dorasan

Nous poursuivons la visite vers la gare ferroviaire de Dorasan. Elle est située sur la ligne Gyeongui qui relie Séoul à Dorasan et peut-être un jour Pyongyang… Le 17 mai 2007, deux convois ferroviaires (l’un parti du Nord et l’autre du Sud) ont franchi pour la première fois depuis 56 ans la zone coréenne démilitarisée. Il existe actuellement un service de passagers qui permet de se rendre à Séoul deux fois par jour, elle est empruntée principalement dans un but touristique, mais sert aussi  pour le transport de matières premières en direction de la « zone industrielle spéciale de Kaesong » (du côté nord-coréen), et de produits finis (en direction de Séoul). L’aménagement de cette zone industrielle de Kaesŏng (Kaesong Industrial Region) dans la province de Hwanghae du Nord en 2002 est vu comme un signe d’ouverture. C’est un parc industriel intercoréen de 66 km2 situé en Corée du Nord, symbole d’une collaboration économique entre les deux Corée. C’est ainsi que 123 entreprises sud-coréennes emploient 50 000 Nord-Coréens et, chaque jour, 400 Sud-Coréens franchissent la frontière pour se rendre à leur travail.

Départ pour Pyongyang...
Départ pour Pyongyang…

Cette gare de Dorasan qui n’a actuellement qu’une fonction touristique a quelque chose d’émouvant, elle est porteuse d’espoir pour la réunification des Corée. Elle est là rutilante, quasiment vide, mais prête à l’emploi pour amener des passagers du Nord au Sud et du Sud au Nord, de Séoul à Pyonyang pour continuer vers la Chine, la Russie et se rattacher au Transsibérien à la Sibérie et à l’Europe ! Il est même possible là d’avoir un tampon, de discuter avec le douanier ou même d’admirer des œuvres intégrées dans la gare…

Tampons de la gare Dorasan !
Tampons de la gare Dorasan

La  visite de cette Zone Démilitarisée (DMZ) suscite de la curiosité qui se mêle à une certaine appréhension d’une mise en scène qui aurait pu être trop artificielle pour satisfaire les touristes. Mais il faut vite convenir que cette excursion très instructive est des plus émouvantes surtout avec la présence de ces visiteurs coréens. C’est le lieu de tous les paradoxes où se mélange un côté touristique avec ses ventes de tee-shirt et autres souvenirs divers, à une présence militaire des plus importantes au monde, c’est à la fois un symbole de guerre fratricide et d’espoir de paix !

Planète Découverte vous emmène dans ce lieu incontournable de la Corée.

Pierre